»Transmis par Lorraine »

Note M.A.V.: je ne peux être qu’époustouflée par le côté visionnaire de Charles Finney. Il est impressionnant de songer que ceci a été écrit au dix-neuvième siècle, quand on sait tout ce qui est arrivé aux réveils qu’a connus par la suite le vingtième siècle … il y a de quoi méditer !

Quand on a recherché un réveil, on a très souvent commis l’erreur d’encourager l’excitation, jusqu’au point où elle devient malsaine.

Un certain degré d’excitation est inévitable.

Quand on veut pousser un pé- cheur à  se tourner vers Dieu, il faut lui faire comprendre et apprécier des vérités qui pro- duiront néces- sairement un degré considé- rable d’excita- tion dans ses pensées.

Mais il ne faut jamais oublier que l’excitation, en particulier quand elle est très vive, expose le pécheur à  de grandes séductions.


La vraie religion consiste à  obéir de cœur à  la loi de l’intelligence, en veillant à  ce que celle-ci ne soit pas influencée par les émotions ou la crainte. Quand les sentiments sont surexcités, la volonté est presque obligée de leur céder. Je ne dis pas qu’il en est nécessairement toujours ainsi. Mais des sentiments exacerbés exercent une influence tellement puissante sur la volonté qu’ils parviennent presque toujours à  la dominer.

Il faut savoir que notre intelligence n’est jamais spirituelle quand elle est contrôlée par nos sentiments, car on agit alors par im- pulsion.

Quels que soient nos sentiments, si notre âme accepte de se laisser contrôler par eux, au lieu de se soumettre à  l’Evangile de Dieu, nous quittons le domaine de l’intelligence spirituelle. Or la vérité nous est révélée par l’intelligence.

En outre, plus l’excitation grandit, plus il est difficile d’obéir à  la loi de l’intelligence. Plus les sentiments sont fortement excités, plus ils tendent à  gouverner la volonté. Et plus ils gouvernent effectivement la volonté, moins l’âme se trouve, et peut se trouver, dans un état spirituel. Ceci est vrai quels que soient nos sentiments.

Il faut toutefois souligner qu’un certain degré d’excitation est nécessaire dans les réveils, pour attirer et fixer soigneusement l’attention de l’intelligence sur la vérité. Mais il n’en faut pas plus.

Quand l’excitation dépasse cette limite, elle devient toujours dangereuse. Quand l’excitation est très vive, au point de dominer la volonté, ceux qui éprouvent cette excitation sont invariablement séduits et se trompent eux-mêmes.

Plus ils sont contrôlés par leurs sentiments, et plus il leur semble qu’ils sont spirituels.

Ils sont conscients d’éprouver des émotions très profondes. Ils agissent en conséquence, simplement parce qu’ils éprouvent ces émotions. Ils ont conscience d’être sincèrement motivés par leurs émotions. Et ils croient être alors réellement spirituels.

En réalité, s’ils sont contrôlés par leurs émotions et non par leur intelligence, ils ne sont pas du tout spirituels.

Nous devons sans aucun doute trouver là  le secret de tant d’es- poirs déçus, dans des réveils où l’excitation a été très grande.

Il faut abso- lument que cette vérité soit com- prise.

Sinon, cette grande exci- tation ne sera pas tenue en bride, mais sera plutôt encouragée.

Chaque fois que l’on a cru qu’un réveil n’était grand que si l’excitation était grande, on a invariablement causé de grand dommages à  la cause de Christ.

On peut certes s’attendre à  ce qu’une grande excitation accompagne souvent les réveils véritables. Mais si l’on arrive à  retenir soigneusement l’attention des assistants, on veillera alors à  n’encourager que l’excitation nécessaire pour permettre à  l’intelligence de contrôler pleinement la volonté. Il ne faut pas que celle-ci soit troublée par des émotions profondément excités.

J’ai souvent vu certaines personnes dans un tel état d’excitation que leur intelligence semblait presque abrutie. Leur volonté semblait être dominée par tout autre chose que la raison. Ce n’est pas une attitude spirituelle, c’est de l’excitation ! Cela a souvent fini par prendre la forme du fanatisme, ainsi que j’aurai l’occasion de le montrer dans ces lettres.

Je le répète, il est dangereux dans les réveils de s’adresser trop exclusivement aux espoirs et aux craintes des hommes. Pour la simple raison que l’homme est un être égoïste. Le fait de s’adresser presque exclusivement à  ses espoirs et à  ses craintes va tendre à  produire en lui une soumission égoïste à  Dieu.

Il s’engagera dans une religion égoïste dont les deux motivations seront d’une part la crainte d’être puni, et d’autre part l’espérance d’être récom- pensé.

Certes, il est vrai que le Seigneur fait appel aux espérances et aux craintes des hommes. Il les menace d’être punis s’ils désobéissent, et Il leur offre des récompenses s’ils obéissent. Mais si le cœur n’est motivé que par l’espoir d’une récompense ou la crainte d’une punition, il ne manifeste aucune puissance.

Quand des pécheurs commencent à  aimer le Seigneur d’une manière désintéressée, et qu’ils se consacrent au bien universel, Dieu leur promet une récompense pour leur service désintéressé. Mais Il ne leur a jamais promis de récompense s’ils Le suivent pour des pains et des poissons. Une telle attitude n’est que de l’égoïsme pur.

Si des pécheurs se repentent et se détournent de leurs péchés, s’ils se consacrent d’une manière désintéressée au bien universel et à  la gloire de Dieu, le Seigneur leur promet de pardonner leurs péchés.

Mais cette promesse n’est pas faite à  ceux qui abandonnent leurs péchés par motifs d’intérêt.

On peut cesser de pratiquer ouvertement le péché pour des motifs égoïstes, mais ce n’est pas ainsi que le péché sera ôté du cœur.

C’est de l’égoïsme.

Il est insensé et absurde de prétendre réellement abandonner le péché en ayant des motifs égoïstes. Tout effort égoïste pour donner notre cœur à  Dieu n’est qu’une confirmation de l’égoïsme. Tout effort d’abandonner le péché simplement par la crainte d’une punition ou l’espoir d’une récompense est de l’hypocrisie. Bien plus, cela ne tend qu’à  confirmer, fortifier et perpétuer l’égoïsme du cœur.

Sans aucun doute, quand les pécheurs sont insouciants, le fait de faire appel à  leurs espoirs et à  leurs craintes est le moyen le plus rapide de les réveiller et d’attirer leur attention sur le salut. C’est peut-être le seul moyen de procéder. Mais quand on a ainsi retenu leur attention, on ne doit jamais oublier la nécessité absolue de les empêcher de s’engager d’une manière égoïste.

Il faut alors leur exposer avec force tout ce qui tend à  les détourner d’eux-mêmes, et les pousser à  consacrer leur être entier au Seigneur.

Nous devons présenter à  leur intelligence le caractère de Dieu et Sa souveraineté. Nous devons leur expliquer Christ, le Saint-Esprit, et le plan du salut. Nous devons leur présenter ce qui peut les détourner de leurs péchés et du besoin de satisfaire leurs propres intérêts, tout en les incitant à  manifester un amour désintéressé et universel.

Par ailleurs, il faut puissamment mettre en lumière à  l’esprit du pécheur sa propre laideur, son égoïsme, son entêtement, son orgueil, son ambition, son inimitié contre Dieu, ses convoitises, sa culpabilité, sa nature repoussante et odieuse, sa mort spirituelle, son esclavage, et tout ce qui concerne sa nature réelle.

  1. Note M.A.V. : qui ose encore parler ainsi aujourd’hui ? Celui qui le ferait déclencherait aussitôt une levée de boucliers « humanistes » chez les autres chrétiens. On l’accuserait de « manquer d’amour », alors qu’il ne voulait QUE SAUVER LE PÉCHEUR…. Notre époque est terrible. La confusion autour du mot « amour » est absolue. Jamais on n’a parlé autant d’amour dans les églises, jamais il n’y a eu autant d’égoïsme ! Et Jésus l’a annoncé clairement comme signe de la fin des temps: « L’amour du plus grand nombre refroidira ». Le véritable amour est remplacé par la « tolérance », dont la vraie motivation est de se justifier soi-même. En fermant les yeux « par amour » sur ce qui va immanquablement perdre le prochain, on pense que Dieu manifestera envers nous la même clémence. Mais Dieu est trois fois saint, ses yeux sont trop purs pour voir le mal , et il ne peut regarder l’iniquité (Habacuc 1:13). Sans vraie repentance, la repentance qui conduit à  se détourner résolument du péché, par amour pour Dieu, le péché reste, le pécheur est coupé de Dieu QUELLES QUES SOIENT SES ILLUSIONS, et va directement à  sa perte…

Face à  son égoïsme, à  sa rébellion, à  son entêtement et à  sa repoussante culpabilité, il faut mettre en contraste l’amour désintéressé et infini du Dieu béni éternellement, Son infinie compassion, Sa douceur, Sa grâce, Sa pureté, Sa sainteté, Sa fidélité et Sa justice.

Ces vérités doivent lui être présentées comme un miroir, jusqu’à  ce qu’elles l’écrasent de tout leur poids et lui brisent le cœur. Il est très aisé de comprendre que tout ceci ne peut être fait sans produire un certain degré d’excitation, parfois considérable.

Mais, il ne faut jamais oublier qu’une forte excitation n’est qu’un mal occasionnel. Elle ne doit jamais être regardée comme hautement favorable à  la conversion du pécheur. Plus l’âme pourra être conservée calme lorsqu’elle contemple ces vérités, et plus la volonté sera libre d’accepter de se soumettre à  ce que lui révèle l’intelligence.

Il est certain que l’on s’est exagérément opposé à  l’excitation souvent rencontrée dans les réveils spirituels. Je le répète, une vive excitation est souvent inévitable.

Mais je ne doute pas non plus que l’excitation ait souvent atteint un niveau qui n’était pas nécessaire, et même que l’on ait déployé beaucoup d’efforts pour provoquer une irrésistible et profonde excitation.

J’ai parfois été témoin d’efforts qui tendaient manifestement à  créer une excitation aussi grande que possible. On a bien souvent employé des moyens qui ne tendaient nullement à  faire plier la volonté des pécheurs, ou à  leur faire intelligemment comprendre les termes du salut.

Au contraire, ces moyens me semblaient produire une sorte de suffisance, par la puissance d’une irrésistible excitation. Je ne peux croire que cela soit sain, ni sans danger, dans les réveils. En réalité, chaque fois que de tels efforts ont été déployés, je crois que tout le monde a admis qu’il en est résulté du mal et non du bien.

Plus j’observe les réveils, et plus je suis impressionné par la nécessité de garder l’excitation au plus faible niveau possible, en tout cas au niveau compatible avec une pleine exposition de la vérité.

Souvent, par un effet de résonance, l’excitation se répand rapidement au sein d’une assemblée. Pour cette raison, il est souvent nécessaire, quand le réveil est puissant, de faire preuve d’une très grande discrétion.

Il faut une grande sagesse pour maîtriser la situation sans blesser personne, quand quelqu’un ne peut plus se maîtriser, est saisi d’une brusque excitation, se met à  pousser de grands cris, éclate en sanglots ou commence à  gémir, en proie à  une vive émotion. Quand un tel comportement est sévèrement réprimé, il se produit aussitôt chez les chrétiens une réaction qui étouffe l’action de l’Esprit.

En revanche, quand ces comportements sont ouvertement encouragés, quand on souffle sur la flamme, on encourage souvent une irrésistible surexcitation dans toute l’assemblée. Peut-être que beaucoup d’âmes sembleront être entièrement gagnées au Seigneur, et que des multitudes feront ouvertement leur soumission à  Dieu.

Mais, finalement, presque personne n’aura agi intelligemment et ne s’avérera être réellement converti.

On dit parfois qu’il n’est nullement gênant que l’excitation soit grande, pourvu qu’elle soit produite par la vérité.

Certes, il est souvent vrai que la compréhension de la vérité produit une grande émotion. L’intelligence est alors confondue, la sensibilité s’enflamme et devient exacerbée, les émotions explosent, et l’intelligence est presque étouffée et annihilée par un torrent d’excitation. Mais un tel état est très défavorable à  une réelle conversion.

J’ai très souvent pu assister à  des cas semblables. Avant d’avoir acquis de l’expérience dans ce domaine, j’étais favorable à  de tels comportements. J’en pensais même le plus grand bien. Mais j’ai appris à  les considérer à  une autre lumière, et à  accorder une confiance bien supérieure à  des conversions qui se produisent lorsque l’intelligence est bien plus calme.

J’aimerais être bien compris. Il n’est pas raisonnable de prétendre que de grandes émotions soient entièrement à  proscrire dans les réveils. Mais je veux être clairement compris sur le point suivant: il ne faut en aucun cas s’efforcer de produire la moindre excitation, au-delà  de celle produite par une lucide et puissante exposition de la vérité.

Toute autre mesure employée pour éveiller l’intérêt, tout ce que nous pourrons faire pour entretenir cet intérêt lorsqu’il est éveillé, ne doit jamais troubler l’action de l’intelligence, ni distraire son attention de la vérité, à  laquelle le cœur doit se soumettre.

Je souligne à  nouveau que tous les débordements émotionnels qui sont pris pour des réveils spirituels ne produisent, en fin de compte, qu’une piété très superficielle, pour la simple raison que l’excitation est trop grande.

On fait trop appel aux émotions. On s’adresse trop exclusivement à  l’espoir et à  la crainte. La prédication veut stimuler les émotions et les sentiments, plutôt que l’intelligence. Il en résulte une tornade d’excitation, qui exclut toute action intelligente du cœur. La volonté est annihilée par le flot impétueux des émotions. L’intelligence est momentanément rendue inopérante et confuse. Elle ne sert plus d’instrument capable de discerner clairement la vérité.

Il ne peut certainement en résulter le moindre bien. Je ne crois pas me tromper en disant qu’une telle erreur a souvent été commise quand on a voulu produire un réveil parmi des enfants. Ils ont toujours nettement tendance à  se laisser emporter par les émotions, et l’on ne peut avoir la moindre confiance en des réveils où l’on a déployé beaucoup d’efforts à  exciter les enfants, et non à  les instruire.

Ils peuvent se trouver engagés dans de véritables tempêtes émotionnelles, à  la suite desquelles la plupart d’entre eux affirmeront et sembleront être convertis, alors qu’ils ont seulement été remués dans leurs émotions. Ils n’ont absolument pas compris ni assimilé correctement la vérité. La conséquence de tels efforts et d’une telle excitation chez des enfants est de les rendre incrédules.

Il en est en vérité de même chez tous ceux qui sont passés par une semblable excitation émotionnelle, et qui n’ont pas reçu d’enseignement suffisamment solide pour leur permettre de tourner leur cœur vers Dieu.

Référence:Le Feu du Réveil, Charles Finney – Editions Parole de Vie, 1996